Aurélie, une infirmière bénévole au Pérou

Aurélie, une infirmière bénévole au Pérou

Tout juste revenus de notre roadtrip de 3 mois en Amérique du Sud, nous reprenons nos interviews de soignants autour du monde. Aujourd’hui nous avons le plaisir d’accueillir Aurélie qui est parti sur les routes de l’Amérique du Sud en alliant voyage et bénévolat en tant qu’infirmière dans une association Péruvienne. 




[wp-svg-icons icon= »eye » wrap= »i »]A lire aussi : L’extraordinaire voyage d’une infirmière aux îles Kerguelen

Aurélie, une infirmière bénévole au Pérou

– Bonjour, est-ce que tu peux te présenter ?

Je m’appelle Aurélie, j’ai 27 ans, je suis infirmière diplômée depuis 2011. J’ai exercé durant 3 ans et demi (jusqu’à juin 2015) en services de médecine dans trois hôpitaux différents, en France (diabétologie, infectiologie, médecine interne, Hepato-gastro-enterologie et Pneumologie). Dans les deux derniers établissements, j’ai essentiellement fait de l’oncologie pendant presque 3 ans.

Aurélie, une infirmière bénévole au Pérou

– Depuis quand es-tu en Amérique du Sud ? Pourquoi as-tu voulu voyager ?

Je suis en Amérique latine depuis octobre 2015 et je rentre en France en avril 2016.

L’idée de voyager, sûr du long terme, seule, je l’ai depuis quelques années en tête. Mais voilà, vie de couple, le travail… et les projets perso sont un peu mis de côtés, pour d’autres.

Puis on se retrouve célibataire et plus vraiment en adéquation entre ses valeurs et le travail que l’on effectue tous les jours. Cancers, morts, travail à la chaine parce que l’hôpital nous demande d’être « rentables », peu de temps pour les patients, travail en stress, une gestion du personnel détérioré et des études qui ne nous préparent pas vraiment à affronter tout ça, psychologiquement…

Du coup, ayant des sous de cotés, je me suis dit que c’était le bon moment de faire une pause afin de sortir un peu la tête de l’eau pour réfléchir. Mon objectif était donc de partir loin, pendant un certain temps, seule, afin de voyager, découvrir et faire toute autre chose durant quelque temps pour m’aérer l’esprit.

J’ai donc démissionné de l’hôpital en juin 2015 où je m’apprêtais à être titulaire, pour partir en Amérique Latine 6 mois.

Après avoir voyagé en Patagonie, le nord du Chili et de l’Argentine, la Bolivie, testé un volontariat, travailler quelques semaines dans un restaurant en tant que serveuse, un déclic s’est produit. Je me suis rapidement rendu compte que mon métier me manquait.

L’humanitariat, j’y avais toujours songé. Un échange scolaire à l’IFSI avec une école d’infirmières de Pologne, un stage de santé publique en France et un module optionnel sur la santé communautaire et humanitaire avaient été une première approche et m’avaient passionné. Mais voilà, il faut quelques années d’expérience.

Alors étant à l »étranger, je me suis dit « pourquoi ne pas reprendre ce projet, faire un volontariat ici pour me permettre de voir si c’est ce dont j’ai toujours envie ? » J’ai donc cherché et c’est au Pérou que j’ai trouvé.

Aurélie, une infirmière bénévole au Pérou

– Comment as-tu trouvé une mission de bénévolat au Pérou ?

Sur le site Helpx (un site de volontariats dans le monde entier, c’est le même principe que workaway).

J’ai envoyé plusieurs mails en spécifiant que j’étais infirmière et que je cherchais à aider dans le domaine de la santé. Car soyons clairs, sur ce genre de sites, il n’y a pas d’annonces de ce genre. Mais « qui ne tente rien, n’a rien! »

– Quelle est la structure qui t’accueille ?

Je me trouve à Chincha, ville de 20.000 habitants à deux heures de route au sud de Lima et à 3 km de la plage!

C’est une ville touchée par un tremblement de terre en 2007 qui détruisit la moitié des maisons et constructions de la ville et fait pas mal de morts. Neuf ans plus tard, la reconstruction commence juste, beaucoup logent encore, par familles entières, dans des petites maisons en taule, communément appelées « bidons villes« . L’accès à l’eau et l’électricité sont difficiles, il y a pas mal d’orphelins, beaucoup gagnent moins que le salaire minimum péruvien tout en travaillant plus de 50 heures par semaines.

C’est donc pour une association péruvienne que je travaille, je propose des activités artistiques telles que danse et musique, gratuitement, aux enfants de la ville.

Pour cela, elle fait venir des volontaires du monde entier. En parallèle, elle travaille avec un hospice catholique pour personnes âgées et un centre d’hébergement pour jeunes mères adolescentes. Il y a un échange entre les élèves de l’asso, les volontaires et ces deux endroits.

– As-tu du payer pour venir en mission comme on voit maintenant certains faire ce qu’on appelle du tourisme humanitaire ?

J’ai juste payé le transport pour venir à Chincha. Sur place, j’ai le logement et la nourriture gratuits. Je ne paye que mon trajet tous les jours pour aller travailler (0,50 cts) et mes extras (sorties…).

J’ai beaucoup de chance, c’est effectivement rare !

Aurélie, une infirmière bénévole au Pérou

Aurélie, une infirmière bénévole au Pérou

– Quel est ton rôle en tant que bénévole ?

J’ai plusieurs missions ici. Étant la seule infirmière de l’asso, mon rôle principal est de faire la « connexion » grâce à un « état des lieux » entre l’asso (côté enfants et personnes âgées) et la municipalité afin que le volontariat sanitaire continue et travaille avec la ville.

Après avoir donc fait l’état des lieux des problèmes de santé majeurs de ces deux populations, j’ai commencé à mettre en place certains projets et j’espère que ça suivra à mon départ. C’est pour cela que je travaille avec la municipalité et que je pars à la rencontre des professionnels sanitaires locaux et ONG internationales présentes ici.

Pour la maison de retraite : mon travail va consister à améliorer les conditions de travail des AS et de vie aux personnes âgées de l’hospice. Les différents axes sont de leur apporter mon aide et mes connaissances dans leur travail de tous les jours, de mettre en place les dossiers de soins pour le suivi et l’évaluation de l’état de santé et de vie des résidents, de revoir certaines organisations et habitudes, notamment, les techniques de la toilette.

Pour le centre d’hébergement des jeunes mères adolescentes : je m’occupe de l’éducation à la santé sexuelle et à la contraception, ainsi que de cours d’anatomie.

Je vais également participer à un projet associatif, en lien avec la municipalité, de nettoyage des rues (ici, la poubelle, c’est la rue) afin d’apporter l’information aux familles du quartier test, sur les risques écologiques et sanitaires de non-gestion des déchets. C’est un projet de sensibilisation et d’éducation.



– Comment les soignants en place perçoivent-ils ton aide ?

Les gens ici, sont super contents et très « touches » qu’une infirmière française viennent ici, dans leur petite ville de Chincha peu connue, pour les aider, gratuitement! Et ils sont très ouverts aux nouvelles idées !

Les choses toutes simples sont déjà beaucoup 😉

– Est-ce que l’éducation à la santé sexuelle est facile à aborder au Pérou ? Est-ce un tabou ?

Oui, la santé sexuelle, ici, est un tabou. Ce thème est peu abordé à l’école et au sein des familles, malgré la présence des moyens de contraception pris en charge par le « seguro » (genre de sécurité sociale) et les campagnes de prévention. C’est d’ailleurs pour ça que les jeunes filles se retrouvent mamans très jeunes et parfois même, adolescentes.

Pour ma part, ça a été plutôt facile à aborder, car ce sont elles qui ont demandé mon intervention. Les cours se passent bien. Elles se confient beaucoup.

Aurélie, une infirmière bénévole au Pérou

– Qu’est ce que t’apporte cette mission ?

Beaucoup !

D’un point de vue professionnel et personnel, car les deux sont liés selon moi, j’ai appris à observer, car nos manières de travailler en Europe que nous prenons pour des « vérités » ne dépendent en fait que de la culture. J’ai donc appris à apporter mes connaissances tout en m’adaptant à la culture et aussi, au manque de moyens.

Les professionnels locaux m’apprennent aussi les « petites astuces » lorsqu’il n’y a pas d’équipement, quand je me sens perdue parce que j’ai l’habitude du tout « moderne/équipe ». Et que souvent, les choses simples sont les plus efficaces.

J’apprends à communiquer, car ici, les manières de travailler, les évidences et connaissances ne sont pas les mêmes.

J’apprends aussi la patience et le lâche prise, que l’on ne peut pas changer le monde et que ce n’est pas non plus ce que les gens attendent de nous, mais que juste semer des petites graines par des actions toutes simples, c’est déjà beaucoup pour des gens qui n’ont rien.

Et surtout, le plus important à mon sens, que dire que ces gens n’ont « rien » est un jugement et que ça ne veut tout et rien dire. De notre point de vue européen, cela signifie qu’ils n’ont pas toutes nos choses matérielles et manquent d’argent. Mais ce que j’ai trouvé ici et dans tous les endroits où je suis passée durant mon voyage, c’est de la chaleur humaine, du partage et de l’entre-aide. Alors, n’est-ce pas plutôt notre culture qui manque souvent de tout ça et qui n’a « rien » en terme de valeurs humaines…?

Donc les maitres mots de ce voyage et de ce volontariat auront été : humilité, patience et lâche prise.

Je sais que j’ai envie de continuer le volontariat. Ce que je ne sais pas encore, c’est si je vais le faire sous couvert d’une ONG ou seule, comme maintenant.

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Aurélie, une infirmière bénévole au Pérou

– Comment as-tu financé ton voyage ?

Seule, avec l’argent que je mets de côté depuis le début que je travaille et qui dormait sur mon livret A 😉

J’ai quand même essaye de voyager à moindre coût: couchsurfing, auto-stop, transports et marches locaux, volontariat nourri et logé…



– Quel est le coût de la vie au Pérou (logement, nourriture, déplacement) ?

Je suis hébergé dans une famille péruvienne, c’est l’association qui se charge de trouver la famille pour chaque volontaire avant leur venue. Du coup, je ne connais pas du tout les loyers, mais je sais que tu peux dormir à l’hôtel pour 5 euros la nuit sans petit déjeuner, pour les moins chers. Ils sont propres et basiques.

Le peu de fois où j’ai mangé en ville, je n’ai pas dépensé beaucoup. Tu peux manger une bonne assiette (riz, lentilles, viande, légumes) pour 3 euros environ.

Pour ce qui est du transport, un aller/retour pour aller au travail en collectivo (genre de taxi, mais plus populaire et moins cher) me coute 50 centimes d’euro par jours. Avec les collectivos tu payes le trajet et pas la distance, contrairement aux taxis. De plus, ces derniers n’ont pas de tarifs fixes…

Le Pérou et la Bolivie, sont vraiment les deux pays d’Amérique Latine les plus avantageux avec nos euros, ça ne coûte presque rien !

Aurélie, une infirmière bénévole au Pérou

Aurélie, une infirmière bénévole au Pérou

– Les enfants dans la ville où tu es, ont-ils tous accès à l’école ? L’école est-elle gratuite ?

Il y a des privées et des gratuites. Évidemment, la majorité va en public par manque de moyens. Donc oui, ils y ont normalement tous accès. J’ai juste entendu dire que l’éducation était basique dans le public et que souvent, les profs avaient beaucoup de lacunes. De plus, beaucoup d’enfants n’y vont pas tous les jours, soit parce qu’ils travaillent avec leurs parents pour aider aux revenus de la famille, soit parce qu’ils sont livrés à eux même lorsque leurs parents travaillent 12h par jours (comme c’est souvent le cas ici). Alors, ils trainent dans les rues…

Comme pour le thème de la sexualité, il n’y a pas vraiment de suivi et d’échanges entre enfants et parents ici. Raison à la pauvreté ou à la culture…? Au départ, c’est d’ailleurs dans le but d’éviter que les enfants trainent dans les rues que l’asso pour laquelle je travaille a été créée.

– Comment peut-on aider l’association où tu es ?

Je ne crois pas qu’il y ait de récoltes de fonds de l’étranger. C’est une asso très jeune (2 ans). Alors pour le moment, le seul moyen c’est de venir y faire un volontariat !

Merci Aurélie pour cette entrevue ! Si vous souhaitez lui poser des questions, n’hésitez pas à le faire en commentaire. Etant donné le nombre conséquent de demandes, nous ne partageons plus les adresses mail des soignants interviewés. 

8 réflexions au sujet de “Aurélie, une infirmière bénévole au Pérou”

  1. Bonjour,
    Pourrais je avoir le nom de l’association ?
    Je suis très intéressée pour une période de volontariat au mois de juillet.
    Merci d’avance!
    Nina

    Répondre
  2. Bonjour, nous sommes étudiantes en 3ème année infirmière et nous avons choisie d’aborder les soins humanitaires pour notre UE optionnelle, notre groupe traite sur le Pérou. Nous aimerions vous contacter pour vous poser des questions afin d’approfondir notre sujet ? Merci d’avance

    Répondre
  3. Bonjour,
    Nous sommes 4 étudiantes en école infirmière et nous souhaitons effectuer un stage humanitaire de 5 semaines au Pérou.
    Nous souhaiterions savoir quel est le nom de l’association et comment nous serions pris en charge une fois là-bas. Ainsi que les frais à débourser en dehors du billet d’avion. L’association intervient elle dans des milieux hospitalier ou en partenariat ?
    Nous vous remercions d’avance.

    Répondre
  4. Bonjour,
    je suis également infirmière et à la recherche d’une association pour me rendre au Pérou. J’ai déjà travaillé avec une petite ONG en Inde, mais malheureusement, elle n’agit pas en Amérique du Sud.
    Ton projet a été fantastique et je souhaiterais me faire une expérience dans la région.
    J’espère recevoir une réponse de ta part,
    Merci beaucoup,
    Ines

    Répondre
  5. Bonjour
    Mon conjoint infirmier, et moi-même souhaiterions partir dans la région pour y réaliser du volontariat.
    Pourriez vous svp me communiquer les coordonnées de l’association ?
    Merci
    Bien cordialement
    Mélanie

    Répondre
  6. Bonjour,

    Je suis actuellement infirmière en Touraine depuis 5ans et je recherche activement depuis 3 mois une mission humanitaire en Amérique Latine.
    J’ai pris une disponibilité de septembre à décembre 2022 afin de partir 12 semaines en volontariat.
    Auriez-vous des conseils, des sites intéressants, ou même le nom de l’association avec laquelle vous êtes partis en 2016 ?

    Merci d’avance 🙂

    Répondre

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